LDE carnet de route p.35 1917

  • 28 novembre 2014
Dimanche 12 août. ━ Journée magnifique.

Quelques obus vont vers l’arrière rappeler qu’on est toujours en guerre.
L’après-midi, partons 4 et un caporal à la réparation de la tranchée de Toul. Du camp des Romains l’ennemi a repéré notre présence et nous envoie une salve de 105. Panique. Abandonnons les outils et fuyons vers les abris.
Ici trois malheureux obus nous chassent comme des lièvres. À Verdun l’orage de fer rend vain un pareil réflexe. Dans un secteur de repos, le poilu répugne à faire la guerre. La peur est plus difficile à maîtriser sous un ciel pacifique que dans le chaos d’une bataille.
Le soir, notre canon de 37 tire sur le fort du Camp des Romains. Étrange ce petit canon ; il pette sec avec son petit obus rapide. Capable de perforer du blindage, il est inopérant contre des tranchées.

Lundi 13. ━ Il pleut et l’orage gronde.

Avec Joutel je visite le village des Paroches enchâssé dans nos lignes, sur notre main gauche. Grimpons à l’observatoire du clocher. Vue magnifique sur la plaine de la Meuse. Dans les rues de Saint-Mihiel les civils vaquent à leurs occupations.
Sur nos lignes quelques 105 s’effritent. À notre retour, le capitaine Malgarny nous attend pour remettre à Joutel la Croix de Guerre gagnée à cote 304 lors du raid de la patrouille ennemie.
Notre caporal, vraisemblablement jaloux, le complimente en ces termes :
━ T’as à présent un brevet d’assassin.
Cette saleté nous met en rogne et l’escouade lui assène quelques dures vérités. Quel salaud !

Mardi 14. ━ Après le jus du matin chauffé sur de l’alcool solidifié, corvée au boyau des Limousins pour creuser des puisards.

Travail à la tâche. Pelles et pioches nous sont aussi familiers que les fusils. Le soir on ramène des caillebotis du P. C. du Commandant.
Nuit calme et claire. Veille pour le principe.
Nous avons appris que demain le 9e Chasseur à cheval viendra nous relever, à pied bien entendu.
À l’escouade on a rouspété un peu avec raison on espérait bien rester un bon mois dans ce lieux paradisiaque.
Au 9e Chasseur j’ai rencontré l’autre jour, à Marcaulieu, mon camarade d’école libre, Peyrebrune. Le front est vaste et cependant il n’est pas rare d’y rencontrer un « pays ».

Mercredi 15 août. ━ L’ennemi nous expédie quelques 105 pour saluer notre départ.

Ce secteur de Saint-Mihiel est vraiment exceptionnel.
Pour passer des messages à travers nos lignes les allemands utilisent des chiens dressés par les services d’espionnage. Une de ces bêtes a été repérée dans la brousse par un de nos postes du côté des Paroches.
Le chien a senti « l’ennemi » et a disparu dans les hautes herbes.
Dernière journée dans ce secteur.
L’escouade ne peut plus supporter son caporal. Ce pauvre homme qui a vraiment la tête un peu détraquée subit du matin au soir railleries et quolibets. Nous parions Dekoninck et moi de monter sur le parapet et d’insulter les boches. Le pari est tenu par le caporal qui croit à notre dégonflage. L’enjeu, un quart de vin.
Je grimpe subitement le premier sur le parapet et debout, face à la tranchée ennemie, petit liseré brun à 200 mètres d’ici, je lance dans mes mains en cornet un vigoureux : « À bas les boches ! »
Au loin l’écho répète le cri vengeur. Rien. Le boche n’a pas pipé !
Dekoninck répète la même scène.
━ Vous êtes complètement cinglés. À faire les louftingues vous ramasserez un jour une balle dans le c… et vous ne l’aurez pas volé... nous déclare rageusement le cabot.
━ À nous le pinard, lui crie sous le nez Dekoninck, et ne ramène pas ta fraise.
Le soir à 10 heures nous sommes relevés par de beaux cavaliers aux équipements frais. Retour au village nègre.

Portfolio

Dans la même rubrique

1917

━ Ah ! les vaques ! les faire attaquer sans préparation d’artillerie ! D’une secousse, le véhicule a franchi le fossé de la route et nous voici (…)

1917

L’année 1917

LDE carnet de route p.6 1917

1917ler janvier 1917. ━ Pour marquer cette journée, nous touchons en supplément, un seau de fromage, de la confiture et pour 4 hommes une (…)

LDE carnet de route p.7 1917

Les officiers du D. D. sont tous d’anciens blessés. Ils doivent le rejoindre comme tous les soldats évacués, après leur guérison.
Le commandant (…)

LDE carnet de route p.8 1917

Et le soliste enchaîne :
Sur le talus renverse la bergère,
Sur l’ennemi renverse les remparts,
Dans les boyaux fous-toi la gueule par terre, (…)

LDE carnet de route p.9 1917

Elle va s’accentuer au point de rendre la respiration impossible. À chaque inspiration une pointe de fer stoppe mon souffle. Je me sens lentement (…)

LDE carnet de route p.10 1917

Pendant mon absence, le D. D. est monté trois fois à l’arrière des lignes pour y faire travaux de défense.
La température s’est adoucie. Mercredi (…)

LDE carnet de route p.11 1917

Après Villey-le-Sec, la Compagnie traverse la défense du camp retranché de Toul. Canton­nements à Gye. Lundi 12 mars. ━ Durant la nuit, nous avons (…)

LDE carnet de route p.12 1917

Le troupeau stoïque et muet ne comprend rien. Enfin, à 11 h. 30, ordre est donné d’embarquer. Ma section occupe l’unique wagon de voyageur et à 1 (…)

LDE carnet de route p.13 1917

Voici Châtillon-sur-Marne. La statue immense du pape Urbain II regarde défiler ces légions de France qui vont refouler le Barbare.
À 5 heures du (…)

LDE carnet de route p.14 1917

Dimanche 22 avril. ━ Aménagement des tentes.
Nous creusons des fossés pour éviter l’envahissement de la pluie qui n’a cessé de tomber toute la (…)

LDE carnet de route p.24 1917

Il tance vertement un cycliste qui eut, pendant sa mission, la veine de crever juste devant la porte d’un bistrot. À l’entrée du village, il (…)

LDE carnet de route p.15 1917

Jeudi 10 mai. ━ Ordre de se rapprocher des lignes pour y faire des travaux de défense.
J’apprends en même temps que je suis désigné pour une (…)

LDE carnet de route p.16 1917

━ Hé ! le mec de la régulière ! où que tu vas ?
━ À Germigny.
━ Tends un peu. On va faire route ensemble.
C’est un joyeux du 3e Bataillon (…)

LDE carnet de route p.17 1917

━ Tu vois les lignes là-bas, elles passent juste devant le fort de Brimont, ce monticule où tombent les gros noirs. Cette ligne de poteaux, ce (…)

LDE carnet de route p.19 1917

Enfin ! des tranchées plus profondes. Les fusées éclatent sur nos têtes et c’est la tranchée de première ligne. Le caporal Dandou nous accueille. (…)

LDE carnet de route p.20 1917

Joutel et Quéhu me font signe et nous appuyons cette fois-ci vers la droite. Un aéro boche qui nous survole lâche une rafale de balles. Devant une (…)

LDE carnet de route p.21 1917

rien de plus que ce que vu. Cependant on apprend que l’ordre de la relève est bien parvenu au P.C. de la Compagnie. Les gens d’en face ne veulent (…)

LDE carnet de route p.22 1917

Je transmets à ma famille tous les renseignements qui peuvent intéresser les pauvres parents. J’ai reçu ce matin un flacon d’alcool de menthe de (…)

LDE carnet de route p.23 1917

conne chaque fois qu’il ramène sa fraise ». Quand il va en permission, il recolle en douce ses anciens galons pour se présenter chez sa fiancée ». (…)

LDE carnet de route p.25 1917

Sur la route de Bar-le-Duc, c’est une longue chaîne de véhicules bâchés qui se dirige vers Verdun. Des territoriaux étendent la caillasse sur la (…)

LDE carnet de route p.26 1917

Lundi 2 juillet. ━ À 6 heures du soir, ordre de lever le camp.
Les tentes sont pliées, les faisceaux rompus. On attend l’arme au pied. (…)

LDE carnet de route p.33 1917

Lundi 16 juillet. - À midi, violent bombardement.
Le soir, second départ pour la relève. En 10 minutes le ravin est traversé sans incident. Au (…)

LDE carnet de route p.27 1917

━ Faites passer de faire silence. Le boyau a disparu. Dans un ravin la file des ombres glisse sur un terrain chaotique. Le ravin de la mort. Plus (…)

LDE carnet de route p.28 1917

À droite, à gauche, près de la grappe humaine fondue dans la même angoisse, des masses de terre et de pierres comblent peu a peu le boyau. À ma (…)

LDE carnet de route p.29 1917

━ Ça fait rien, il n’a pas les foies, murmure Wanlin à mon oreille. Dersigny a disparu et après lui, les minutes se succèdent longues et (…)

LDE carnet de route p.30 1917

Et la chaîne fonctionne toujours et les obus plus serrés que jamais piochent la terre entre la tranchée Bouchez et nous. ━ Hep là ! on a pas dit (…)

LDE carnet de route p.31 1917

Dans l’après-midi l’ordre arrive d’évacuer la première ligne ; notre artillerie doit effectuer un tir de destruction sur les réseaux ennemis. Pour (…)

LDE carnet de route p.32 1917

lignes une couverture pliée sous son bras. Rapidement j’épaule et tire. Je manque le but. J’arme de nouveau, mais la culasse boueuse glisse (…)

LDE carnet de route p.34 1917

Mardi 7 août. - Pour la 5ème fois je quitte La Réole. Mon frère Paul, guéri de sa blessure m’accompagne jusqu’à Bordeaux. Il rejoint son dépôt à (…)

LDE carnet de route p.36 1917

Jeudi 16 août. ━ Au matin des camions enlèvent le Bataillon et le dépose à Velaines, près de Ligny-en-Barrois.
Pays ravissant et hospitalier. (…)

LDE carnet de route p.37 1917

C’est vers Vous, Seigneur, que monte notre suprême prière. En Vous, nous mettons tout notre espoir, tout notre faible espoir de vivre. Dehors pas (…)

LDE carnet de route p.38 1917

d’un camarade voisin, aussi à gauche, un groupe forme troupeau autour du Lieutenant. Peu à peu la progression nous échauffe. Le défaut de réaction (…)

LDE carnet de route p.39 1917

de ce massacre. Noireau est tué net à ma droite, près de lui, un homme se tortille comme un ver et les canons rugissent toujours tandis que des (…)

LDE carnet de route p.40 1917

Ce soir corvée de soupe avec Turgis et Poteau. Le ravitaillement doit monter jusqu’à Esnes-en-Argonne. Je charge les deux bouteillons et Turgis (…)

LDE carnet de route p.42 1917

Mercredi 29. ━ Le secteur est nettement plus calme, quelques obus dans la journée. Le ravitaillement n’a pu monter la nuit dernière, coupé par (…)

LDE carnet de route p.43 1917

Vendredi 31. ━ Journée très calme et chaude.
Le soleil embrase littéralement le fond sableux de notre carrière. On cherche l’ombre contre le (…)

LDE carnet de route p.44 1917

Dimanche 2 septembre. ━ Le soleil est revenu et ses rayons bienfaisants nous permettent de sécher nos vêtements boueux.
La cote 309 est un (…)

LDE carnet de route p.45 1917

À Dombasle-en-Argonne, nous rattrapons l’escouade et la marche vers Jubécourt se poursuit silencieusement. Les hommes avancent cahin-caha sur des (…)

LDE carnet de route p.46 1917

Dimanche 16 septembre. ━ Le secteur est redevenu calme et le ciel, qui a eu pitié de nous, nous verse une douce chaleur.
Journée ensoleillée. (…)

LDE carnet de route p.47 1917

Jeudi 20. ━ Bombardement des deux côtés.
Suis de corvée de soupe. Nuit très noire. En file serrée, la corvée se dirige par une piste vers le (…)

LDE carnet de route p.49 1917

Le soir nous retrouve dans la tranchée avec nos pelles et pioches. Une mitrailleuse d’en face nous arrose de balles, la pièce fait un tir (…)

LDE carnet de route p.48 1917

Si le coup de main est pour nous, l’ennemi sera bien reçu. Pour le moment la section n’a pas écopé et bien que les 88 s’acharnent sur notre (…)

LDE carnet de route p.50 1917

Mercredi 10 octobre. ━ Tenue de tranchées.
On relèvera le 87e R.I. au soir. Départ à 6 heures pour le même secteur. Il pluviote et dans le (…)

LDE carnet de route p.51 1917

Dimanche 14. ━ Beau temps mais froid.
Le brouillard s’attarde dans le ravin jusqu’à midi. Bombardement sur la droite. Un cri dans la nuit suivi (…)

LDE carnet de route p.41 1917

l’insomnie, et l’eau et la boue viennent ajouter à notre lamentable misère. L’énervement nous gagne. Pour des riens, de violentes disputes (…)

LDE carnet de route p.52 1917

Samedi 20 octobre. ━ Temps toujours brumeux, mais avant midi le soleil parvient à crever la croûte blanche et la masse crémeuse s’écoule en (…)

LDE carnet de route p.53 1917

Dimanche 21 octobre. ━ Beau temps.
Notre 75 tiraille toute la journée et les flocons bleus s’égrènent sur la crête d’en face. Le soir vers 9 (…)

LDE carnet de route p.54 1917

Lundi 5 novembre. ━ La tranchée est bonne, la section occupe un petit abri, peu profond mais solide.
Sur notre droite le Mort-Homme est très (…)

LDE carnet de route p.55 1917

Samedi 10 novembre. ━ Relève par le 87e R. I., sans histoire. À 5 heures du matin, sommes au bois. Le lendemain nettoyage général des armes et (…)

LDE carnet de route p.56 1917

Lundi 19. ━ Vers 2 heures du matin, l’ennemi déclenche sur nous un violent tir de barrage.
Nous sommes en seconde ligne, aussi nous encaissons (…)

LDE carnet de route p.57 1917

Vendredi 23. ━ Journée claire.
Un peu de soleil, c’est un bonheur d’en sentir la douceur. Violentes rafales sur les pistes.
À 10 heures du (…)

LDE carnet de route p.58 1917

21 décembre. ━ Exercices.
Sur les petits coteaux qui dominent Thonnance-lès-Joinville, nous jouons à la petite guerre, pour ne pas oublier (…)

LDE carnet de route p.59 1917

Vendredi 28. ━ Ordre de rejoindre le front de Lorraine, mais on ne partira que demain.
On aura tiré 3 jours sous la paille.
Samedi 29. ━ (…)