Réchicourt-la-Petite

  • 22 décembre 2014
Localisation

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Histoire
Le Moyen Âge et la période moderne

La toponymie de Réchicourt-la-Petite nous renseigne sur les origines du village qui semble être fort ancien. Il y avait dès les temps romain ou gallo-romain un domaine, un "Curtis" dont le premier possesseur s’appelait probablement Richard. Entre 1127 et 1168, le village a des seigneurs particuliers. Il appartient, d’après une charte du prieuré de Flavigny-sur-Moselle, à un seigneur nommé Matfridus de Richiscurt. Une autre charte du prieuré de Flavigny-sur-Moselle mentionne le don d’une dame, nommée Cunégonde, aux Bénédictins de Flavigny de la moitié de la cure d’Essey-les-Nancy entre 1126-1140. Cette dame est la femme de Mafridi de Richiscurt comme le souligne le texte en latin : "Cunigondis, uxor Mafridi de Richiscurt pro salute animae suae & mariti, & filiorum dedit Sancto Firmino dimidium ecclesiae de Aceio, quartarium unum cum uno servo". La même Cunégonde, veuve "du seigneur de Richiscurt en contemplation de l’âme de Thierry, son fils" donne la dime de la paroisse de Dompierre à l’Église de Chaulmousey.

Les premières mentions de Réchicourt-la-Petite apparaissent aussi dans les cartulaires des monastères de Salival et de Haute-Seille qui vont soit bénéficier des largesses des seigneurs locaux, soit acheter les terres, rentes et héritages dont se séparent la noblesse locale. Ainsi, "en 1268, Mathieu, duc de Lorraine, déclare qu’en sa présence, Mathieu de Moyenvic, du consentement de sa femme Isabelle, a vendu à l’abbé du couvent de Clairvaux, la troisième partie de la dîme de Réchicourt, près Marsal (de Regis curia juxta Marsallum). Au mois de mai 1269, l’abbaye de Salival achète d’une nommée Jakematte, veuve de Perrin Kabaire, bourgeois de Vic, une maison et une grange, situées à la Petite-Réchicourt, (Richeicourt), et plusieurs terres et prés au ban dudit lieu. Le 22 janvier 1279, Renbauz et Perrins Charterius donnent à la même abbaye ce qu’ils avaient au cours d’eau du moulin de la Petite Réchicourt. En 1290, Bauldouin, dit Thoneins, de Bathelémont, fait encore donation aux religieux de Salival de ce qu’il possédait en héritages à la Petite Réchicourt. Au moins de novembre 1485, l’abbé de Salival admondie à Jacob This et à Hanus de Marsal le moulin de la Petite Réchicourt, avec les dépendances, pour en faire un foulon (moulin).

Par son testament en date du 25 novembre 1657, Nicolas Gérardin, prêtre séculier, curé de la Petite Réchicourt, [du vocable de Saint Laurent] donne à son église et à ses successeurs tous les acquêts qu’il avait faits audit lieu moyennant une messe haute de Requiem tous les vendredis soirs de l’année, et une messe basse, le premier samedi de chaque mois, à l’autel de la Vierge. Un pied-terrier de 1731 fait mention de terres dites le ban Saint-Jean, situées au finage de Réchicourt et appartenant à la commanderie de Gelucourt".

La Révolution de 1789 à Réchicourt-la-Petite

La Révolution de 1789 n’épargna pas le village. En 1907, M. Charles Étienne a publié, sous l’égide du ministère de l’instruction civique, les cahiers de doléances des bailliages de Metz et de Nancy pour les États-Généraux de 1789. Les habitants de Réchicourt-la-Petite y insèrent vingt-neuf doléances dans un procès-verbal daté du 15 mars 1789, doléances qui seront rapportées ci-après : "sont comparus au greffe de notre municipalité, par-devant bous Jean-François Marcel, maire de la justice, et syndic de la municipalité". Le village compte vingt-neuf feux et les députés sont Jean-Joseph Hannezo et Nicolas Fouquignon. Les signataires du cahier sont Jean Griffaton ; Jean-François Marcel, maire et syndict ; Jean-Joseph Hannezo ; Nicolas Fouquignon et Jean-Gaspard Simon.

Les remontrances nous permettent de se faire une idée de la vie quotidienne des habitants du village, principalement l’agriculture, même si cette idée ne reste qu’une ébauche : "Les habitants de la commune de Réchicourt-la-Petite, soussignés, demandent humblement à Sa Majesté, conformément à ses intentions énoncées dans ses lettres du 27 février 1789 :

1-La suppression des salines à raison de la cherté des bois. Les poêles y sont beaucoup multipliées depuis quelques années, et les forêts s’abroutissent de jour en jour ;
2-De rendre le sel commerçable ; la cherté de cette denrée de première nécessité, tant pour les hommes que pour les bestiaux, est très nuisible à la santé des habitants et des animaux ;
3-La suppression des acquits de Lorraine pour les marchandises dudit pays qui se consomment dans les Trois-Évêchés. L’édit de Léopold de 1725 dit que, moyennant un certificat, comme les denrées tirées de Lorraine sont pour les Trois-Évêchés, on doit percevoir un passavant sans frais, même de timbre. Cependant les buralistes exigent deux sols de France pour chaque voiture, malgré certificat en forme ;
4-L’examen et la suppression, (s’il échet), de plusieurs péages à Arracourt, à Einville-au-Jard, à Bauzemont, Bénaménil et à Lunéville ;
5-Suppression du tiers du seigneur dans la vente des biens de communauté, s’ils n’aiment mieux contribuer au tiers des charges ;
6-La permission de couper sans frais de Maîtrise et sur délibération en municipalité des poiriers champêtres dépérissant de vieillesse, et de les vendre pour frais de communauté sans tiers aux seigneurs.
7-Établir un ordre fondé sur l’humanité dans les contraintes pour deniers royaux. On a vu des porteurs de contraintes aller et revenir de village en village en passant jusqu’à quatre jours de suite dans le même et exigeant 20s. par jour dans chacun. On a vu arriver des contraintes à midi le lundi, le rôle n’ayant été publié que le dimanche, et sans délai. Le Roi ignore toutes ces vexations ;
8-Supprimer l’édit des clôtures et rétablir le droit de parcours ;
9-La suppression du droit de châtrage dû au seigneur évêque de Metz, ou du moins de permettre à chacun de châtrer ses propres bestiaux, mâles et femelles ; les châtreurs jurés ne viennent que deux fois par an ;
10-Partager les droits publiques dans une répartition égale et proportionnelle aux possessions entre les Trois Ordres ;
11-Défendre aux employés des Fermes de venir fouiller dans les maisons sans être accompagnés d’un officier public ;
12-Etablir un nouvel arrondissement entre les bans et finages de Riouville, de Juvrecourt et de Réchicourt pour le droit de parcours et de vaine pâture seulement, sans nuire aux propriétés des dîmes et autres ; et proportionner l’étendue desdits finages au nombre des charrues tournantes de chaque endroit et à l’étendue de la culture. Riouville était jadis un village avec paroisse, et il n’y a plus aujourd’hui que deux censes de la paroisse d’Arracourt pour un ban fort étendu dont les terres sont cultivées en grande partie par des laboureurs de Réchicourt et des endroits voisins. Anciennement les troupeaux de Réchicourt avaient droit de parcours jusqu’à l’angle du clocher dudit Riouville, qui n’existe plus aujourd’hui ;
13-La suppression d’un colombier à pied à Réchicourt, possédé par un roturier n’ayant qu’un bien roturier. Mgr l’évêque de Metz, seigneur du lieu, n’y possédant pas un pouce de terre, ne peut y avoir de colombier, ni, par conséquent, céder son bien à un autre ;
14-la cote particulière de Réchicourt dans les impositions royales est exorbitante. Nous en avons présenté le tableau à Mrs les officiers de l’Assemblé du district : il n’y a aucun bien de communauté partagé ni partageable, ni bois, ni pâtis, ni même de fabrique ; et, cependant, tous les habitants sont des deux premières classes, n’y ayant qu’un seul de la 3e classe payant deux sols moins de douze livres, et aucun de la 4e ni de la 5e. Cependant, il y a plusieurs manœuvres ne vivant que du travail de leur main, sans aucune propriétés : ils demandent en conséquence une diminution considérable. L’intention du Roi, dans ses instructions à la première Assemblée des notables, était qu’un manœuvre sans propriété ne fût taxé qu’au prix qu’une de ses journées de travail ;
15-Nous désirerions des États provinciaux avec des Districts subordonnés ; mais nous craignons que ceux qui auront l’honneur de représenter leurs concitoyens n’exigent de trop fortes pensions qui augmenteraient encore la surcharge des impositions, déjà si onéreuse. Nous désirerions de plus que la province pût être consultée sur le sujet d’organisation à leur donner : ce serait un moyen de supprimer les grosses pensions des intendants et subdélégués qui, par là, deviendraient inutiles ;
16-Les États provinciaux seraient un moyen de supprimer la Ferme générale en y substituant des régies particulières, même pour les domaines du Roi dont ils pourraient être chargés ;
17-Supprimer les deux tiers des trésoriers, et diminuer les fortes rentes qu’ils perçoivent sur les sommes déposées en leurs caisses ;
18-Supprimer les marques des cuirs et des fers qui sont de première nécessité pour le peuple, et surtout pour l’agriculture ;
19-Établissement du tarif et reculement des barrières aux frontières, et, par conséquent, suppression de la plus grandepartie des employés. Ce sera délivrer le peuple d’un grand fléau. Ils deviendront inutiles dans l’intérieur du royaume, s’il n’y a plus de contrebande ;
20-Supprimer les justices seigneuriales et mêmes les petits bailliages. La facilité de trouver des justices trop multipliées multiplie aussi les procès : il serait à souhaiter que personne ne fût reçu à plaider dans aucune justice sans avoir auparavant pris l’avis de la municipalité, qui ne pourrait être donné sans avoir entendu les deux parties. Que de procès seraient étouffés par là !
21-Réduction du traitement des gouverneurs, des commandants, et des pensions et appointements trop considérables. C’est ce qui produit le luxe qui insulte le peuple et l’écrase ;
22-Fixer les impôts sur tous les objets de luxe, en les diminuant d’autant sur les denrées de première nécessité ;
23-Supprimer les privilèges de quelques villes et les soumettre toutes également à la subvention. Ce sont des gouffres qui dépeuplent la campagne en attirant à eux ses habitants ;
24-Supprimer les abbayes en commende et en abandonner les revenus aux provinces pour supporter les charges de l’État ;
25-Suppression des jurés-priseurs ;
26-Abolition d’une partie des verreries, faïenceries et brasseries ;
27-Suppression de 16 livres 5 sols 8 deniers de cens annuel et de quelques chapons payés au seigneur évêque de Metz ;
28-Abolition du payement de plusieurs chapons de rente annuelle et de quelque argent payé à l’abbaye de Salival et au sieur curé par plusieurs particuliers, et de cinq pires et demie de quartes moitié blé, moitié avoine, et de douze sols messin payé au prieur commendataire de Saint-Christophe de Vic ;
29-Abolition d’un impôt de 3 livres 12 s. payé annuellement pour le logement des cavaliers de maréchaussée. C’est une imposition nouvelle, établie depuis 4 ou 5 ans.
Fait et arrêté à Réchicourt-la-Petite en assemblée de communauté, le 15 mars 1789. J. Hannezo, N.Fouquignon ;Jean Griphaton ; J-Gaspard Simon ; J-François Marcel, syndic6".

Réchicourt-la-Petite au XIXe sièclemodifier
Dans son Dictionnaire statistique du département de la Meurthe, publié en 1836, l’abbé E. Grosse nous donne quelques informations précieuses sur le village : " […] situé près de la route de Moyenvic à Lunéville, sur une côte peu élevée, à 10 kil. au s. e. de Vic, chef-lieu de Canton, à 16 kil. au s. e. de Château-Salins, chef-lieu de l’arr., et à 39 kil. à l’E. de Nancy. Pop. : 233 ind., 23 élect comm., 10 cons. mun., 47 feux et 39 habitations. Territ : 438 hect., dont 422 en terres arab. et 16 en prés. Mes. de Vic ; les lettres viennent par Moyenvic. Ce village paraît remonter à une période assez lointaine : nos anciennes chroniques en font mention, mais en se contentant de le nommer, sans donner aucun détail sur son histoire. On sait que Réchicourt appartenait au domaine des évêques de Metz : il répondait à la châtellenie de Vic, bailliage de cette ville, généralité et parlement de Metz, avec les coutumes de l’évéché. Quant au spirituel, il faisait également partie du spirituel du diocèse de Metz ; aujourd’hui, c’est l’annexe de Bezange-la-Petite7.

En 1822, il y avait 182 habitants, 36 feux et 27 habitations. En 1862, Réchicourt-la-Petite fait partie du canton de Vic avec Arracourt, Athienville, Bathelémont-les-Bauxemont, Bezange-la-Grande, Bezange-la-Petite, Bourdonnay, Bures, Coincourt, Donnelay, la Garde, Hellocourt, Juvelise, Juvrecourt, Ley, Lezey, Maizières, Marsal, Moncourt, Moyenvic, Ommezay, Vic, Xanrey et Xures. Ces vingt-quatre communes comptent 13,825 habitants.

Avant 1870 cette commune faisait partie du Canton de Vic-sur-Seille. Après le traité de Francfort, elle a intégré le nouveau canton d’Arracourt avec les huit autres communes restées françaises.
Village endommagé en 1914-1918.

Lieux et monuments

Bien qu’il ne reste aucune trace physique de ces monuments, les textes mentionnent plusieurs d’entre eux. Un colombier, signe de la puissance seigneuriale, se dressait sur le territoire de Réchicourt-la-Petite. Se trouvait-il à côté d’une maison seigneuriale ou d’une maison-forte, résidence des seigneurs attestés possesseurs de la terre ? Rien n’est certain. Le moulin, où les habitants faisaient moudre leur grain, a également disparu.

Édifice religieux

L’église, sous le vocable de Saint-Laurent, a été reconstruite après 1918.

La cure du village était unie dès les temps les plus reculés ; c’est-à-dire qu’elle était associée avec la manse d’un chapitre, en l’occurrence celui de Domèvre. Il n’est pas connu à quelle date la cure devînt régulière. Peu après 1726, un bras de fer commence entre le Révérend Père Piart, abbé de Domèvre, collateur des cures de Destrich (Destry) et de la Petite Réchicourt, et Mgr de Coislin, prince-évêque de Metz et duc et pair de Coislin, pour pourvoir les deux cures. L’abbé Chatton le décrit ainsi :

"À la mort du P. Biget (1728), qui l’avait gouvernée pendant 40 ans, le chapitre de Domèvre nomma le P. Renardy pour le remplacer. L’évêque de Metz lui refusa l’institution, prétendant que la cure était séculière, et y nomma un sieur Durand. De là un procès jugé à Trêves où le P. Renardy fut condamné par défaut. Pour transiger on offrit à l’évêque de lui céder Amenoncourt, ou Autrepierre, ou Verdenal, cures occupées par des séculiers. Il se plaignit qu’on lui offrait ce qu’il y avait de moindre et voulut refuser les ordinands de la Congrégation. Enfin il accepta Repaix ; la transaction fut signée du 25 février 1730, et le P. Renardy reçut l’institution canonique. L’abbaye voulait garder Réchicourt comme pied-à-terre pour les religieux qui allaient à Viviers, à Vic ou à Pont-à-Mousson.
En 1737, l’église fut rebâtie sous l’administration du P. Renardy. À sa mort (1747), le P. Malherbe lui succéda ; mais l’évêque ne lui donna qu’une institution restrainte contre laquelle il n’osa réclamer ; il n’y resta pas, mais ses successeurs furent plus heureux. (Arch dép., H 1384, 1440). En effet, L’évêque de Metz, Mgr de Saint-Simon, avait donné les pouvoirs au P. Malherbe, " pour un an seulement et en faisant insérer dans les lettres d’institution cette clause inaccoutumée : ’salva natura benecifii, salve juro nostro et cujuslibet alterius.’ Le chanoine régulier écrivait qu’il n’avait osé protester contre cette nouveauté, ’parce que, disait-il, je craignais de le fâcher beaucoup par là, ce que je devais extrêmement craindre, non seulement pour moi, mais pour notre congrégation, contre laquelle il est extrêmement indisposé’16".
Au plus fort de la controverse, l’abbé Piart, prieur de Domèvre, écrivit cette lettre à l’évêque de Metz, le 26 avril 1729. Cette dernière renseigne le lecteur sur le contentieux :

"Monseigneur,
Il m’est bien douloureux, et j’ai ce me semble bien lieu de me plaindre ; qu’après toutes les attentions que je me suis données pour ne rien faire, ne rien dire ny rien écrire en quoi votre Excellence pût m’accuser de m’être écarté d’aucune règle à son égard, et particulièrement au sujet des cures de Destrich et de la Petite Réchicourt, nous aiant au contraire gardé toutes celles que le respect le plus profond et le dévouement le plus sincère peuvent prescrire dans les bornes de la vérité, de la justice et de la conscience, vous aiez, monseigneur, en plusieurs occasions parlé de moi avec de grands mépris, et que vous témoigniez par vos lettres des indispositions contre moi personnellement, qu’il semble que rien ne puisse guérir, sans que la charité, même épiscopale de V. E. la porte à entrer en rien de ce que je peux lui proposer en toute humilité pour le bien de la paix, comme je le vois en dernier lieu par sa réponse à ma lettre précédente, qui devait vous toucher et adoucir. Je l’ai lue, Monseigneur, cette réponse à notre chapitre, et s’il en a été surpris pour les raisons que je viens de dire, elle ne lui a pas fait changer la résolution prise l’an dernier, de défendre ses droits sur la cure de la Petite Réchicourt aussi bien que celle de Destrich, nonobstant les risques que votre grand crédit et puissance auroit pu lui faire craindre, se confiant dans la protection de Dieu et de la justice, qu’il espère encore rencontrer en France comme ailleurs. Quant à ce que vous dites, Monseigneur, de la manière dont il a obtenu un arrêt, pour la cure de D. qu’elle ne doit pas lui être agréable, et qu’elle prouve fort que sa prétention étoit mal fondée, c’est ce qu’il n’a sceu comprendre, mais qu’il sera content qu’il n’en arrive de même pour Réchicourt, ne croiant pas que ses prétentions puissent être prouvées justes avec plus de certitude, ny plus authentiquement que par un seul arrêt, et il se consolera néanmoins, sans beaucoup de peine, si, contre sans attente, s’il en arrivoit autrement.
Vous ajoutez qu’il voudroit garder tous ses bons bénéfices, et abandonner tous ceux dont le revenu est médiocre, ce qui me prouve pas son désintéressement ; mais le cas de la Petite Réchicourt indique le contraire, et il paroit à notre chapitre que c’est V. E. qui voudroit lui ôter ses meilleurs bénéfices, et lui laisser seulement les moindres et les plus pénibles, ce qu’il ne croit ny juste ny équitable. Du reste c’est peu connaître les bénéfices d’Amnoncourt et d’Autrepierre, dans les droits desquels j’avois écrit à V. E. que nous pourrions rentrer, et que cependant, se trouvant entre les mains de prêtre séculiers, nous étions résolus de les y laisser pour toujours si elle se relâchoit sur la Petite Réchicourt, que de les mettre au rang de bénéfices médiocres, puisque celui d’Amnoncourt est estimé valoir mil écus au curé, et celui d’Autrepierre près de six cents par année. Non, Monseigneur, ce n’est point l’esprit d’intérêt qui nous fait agir. C’est celui du bon ordre et de la justice, qui ne permettent pas qu’étant par notre état capables et appellés à désservir des cures, et d’ailleurs fondés en titres et possession, nous nous en laisserions, pour ainsy dire, chasser honteusement, sans dire mot. Et notre résolution est qu’à l’égard des cures dont nous sommes collateurs et décimateurs, et dont le dernier état est d’être possédées par des chanoines réguliers, nous ferons tout ce qui dépendra de nous pour qu’ils en jouissent.
Touchant le sr Aymond, il s’est trouvé non seulement disposé, mais si désireux de passer à la cure de Gogney, abandonnant celle de Réchicourt-la-Petite, qu’aussitôt qu’il a seu que celle-la étoit vacante, il est venu me prier d’écrire à sa faveur à Monsieur l’abbé de Moyenmoutier pour a luy asseurer, ce que j’ay fait, et peut-être est-il déjà allé avec sa nomination vers V. E. pour en obyenir des institutions.
Si cette ouverture à vous relâcher en votre faveur sur un point d’aussy petit importance ne vous a pas plut, Monseigneur, j’en suis fâché ; nous plaiderons donc puisque vous le voulez absolument, et ny le souvenir de votre consentement donné à ceux que nous nommassions un de nos confrères pour la Petite Réchicourt avec asseurance que vous lui donnerez des institutions ; les avis même de M.M.Vannier et Rulland pour ces institutions ; ny le jugement porté sur la cure de Destrich, ny nos titres et possessions, dont la dernière de plus de cinquante années, ny notre qualité de chanoines réguliers, capables de posséder des cures même séculières, jointes a nos droits avoués de collateurs et de décimateurs de la Petite Réchicourt ne peuvent vous toucher pour la paix et la tranquillité de notre chapitre.
S’il s’agit de conscience, en vérité, Monseignr, la nôtre est bien en asseurance de ce côté là sur tants de fondemens, et pour vous témoigner du procès, nous n’en aurons pas si votre Excellence (qui me dit qu’elle a voulu donner des institutions pour Destrich à notre religieux par considération pour nous, qui ne feroient pas de tort à la sécularité, et que nous les avons refusées), veut bien en donner de telles au P. Renardy pour la Petite Réchicourt, sans qu’elle exige de notre part aucun acte qui reconnoisse que le bénéfice est séculier, ou qui nous lie les mains pour ne pouvoir jamais dans la suite des tems y nommer de chanoine régulier, autrement nous ne pourrons en conscience ne pas faire tout ce qui dépend de nous pour soutenir nos droits. Et nous ne croirons manquer en rien pour cela à la vénération très-sincère et au dévouement entier avec lesquels j’aurai toujours l’honneur d’être
Monseigneur
de votre Excellence
très humble et très obéissant serviteur
Piart, abbé de Domèvre
Domèvre, 26 avril 172917.

Les dîmes de Réchicourt-la-Petite se montaient à 460 livres au XVIIIe siècle.