Longpré-les-Corps-Saints

  • 4 janvier 2015
Localisation

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Histoire
Les Corps Saints (reliques acquises par le seigneur parti aux Croisades)

Le maïeur d’Abbeville, Aléaume de Fontaines, seigneur et chevalier d’illustre maison (apparentée aux comtes de Ponthieu), fonda une collégiale à Longpré. La première prébende date de 1190. L’acte de fondation mentionne les tourbes d’un marais dont le chanoine aura l’usage. Ce document atteste ainsi qu’à cette époque reculée, on exploitait déjà les tourbières qui contribuèrent à la richesse de la vallée de la Somme.

Aléaume, parti en croisade pour accompagner Philippe Auguste, se conduisit vaillamment à Saint-Jean-d’Acre, et resta en Orient après le départ du roi. Après avoir rejoint à Constantinople l’armée commandée par Villehardouin, ce bon chevalier du Christ regagnait Jérusalem, quand après seize années passées en Terre sainte, il mourut de la peste.

L’évêque d’Amiens, Richard de Gerberoy, prévenu de l’arrivée de Constantinople d’un messager du seigneur picard défunt, porteur de précieuses reliques, vint solennellement à sa rencontre. Le 4 août 1205, Vibert, arriva à Longpré pour doter, au nom d’Aléaume de Fontaines, la collégiale de certaines des inestimables reliques que les dignitaires croisés s’étaient partagées. L’année 1205 est donc capitale dans l’histoire de Longpré, dont la réputation s’accrut depuis le Moyen Âge. La collégiale bénéficia de nombreuses autres donations, plusieurs papes et notamment Innocent III et Grégoire IX lui accordèrent leur protection. La ferveur attira les foules dans le sanctuaire de la paroisse devenue, grâce à ses reliques, « Longpré-les-Corps-Saints ».

C’est ainsi que, de nos jours encore, quelques reliques, ayant pu échapper aux outrages du temps et des révolutions, sont promenées chaque année, le 8 septembre, en procession dans le bourg.

L’église collégiale initiale date donc des dernières années du XIIe siècle, et n’était sans doute pas complètement achevée à la mort d’Aléaume, dont la veuve, Laurette de St-Valéry, et le fils, Hughes, créèrent de nouvelles prébendes. Laurette abandonna à Hughes le château de Long, pour résider avec ses deux filles à Longpré, près de l’église abritant les précieuses reliques. Très pieuse, selon le père Ignace, elle partagea désormais son temps entre l’entretien de l’église et la visite des malades, étudiant même la médecine afin de mieux les soulager.

Développement lié à la dévotion

Le comte de Ponthieu, désirant posséder une des reliques de Longpré et ne pouvant offrir en échange qu’une côte de Saint Vulfran, gratifia d’une prébende la collégiale instituée il y a peu. L’église compta alors bientôt 12 chanoines, auxquels vinrent se joindre d’abord 5 chapelains, puis les 2 titulaires aux cures de Longpré et de Wanel (Ceux-ci prenant place dans le chœur avec les chanoines et récitant avec eux les heures canoniales). Dès lors, 19 ecclésiastiques officièrent auprès des saintes reliques.

L’église, uniquement collégiale à l’origine, donc réservée aux offices capitulaires, vit sa nef ouverte à l’exercice du culte de la paroisse, suite à un accord passé en 1365 devant l’official d’Amiens entre les paroissiens et le chapitre. La vieille église paroissiale, Saint-Martin, fut dès lors peu à peu délaissée : on n’y officia plus que deux fois par an, le 4 juillet et le 11 novembre. De cette église Saint-Martin, ne subsiste plus aujourd’hui, que les traces toponymiques : la rue Saint-Martin et le Voyeul Saint-Martin.

Le chapitre possédait quatorze maisons. Treize d’entre elles, groupées autour de l’église, ont donné leur nom à l’actuelle rue des Cloîtres.

Périodes troublées

Au xive siècle, le bourg de Longpré fut incendié deux fois par les Anglais au cours de la Guerre de Cent Ans, la première fois avant la Bataille de Crécy, la deuxième fois avant celle d’Azincourt.

Son église, ayant cruellement souffert, menaçait de tomber en ruine quand le Pape Eugène IV en fut informé et accorda, en 1437, de nombreuses indulgences aux fidèles qui feraient des aumônes pour la réparation et l’entretien de l’édifice.

A l’angle Nord-Ouest de l’église, vestiges des colonnes qui soutenaient le déambulatoire à l’intérieur de la Collégiale
Après avoir été fort mutilée, la collégiale dut donc être remaniée. C’est probablement pour en couronner les importants travaux que l’Évêque d’Amiens en fit en 1505 une consécration solennelle.

De nouveaux désastres et ravages n’épargnèrent pas la localité lors des affrontements avec les Huguenots. À leur approche, les habitants de Longpré émigrèrent en masse, les chanoines se réfugièrent à Abbeville, à Saint-Vulfran. Le calme rétabli, la collégiale d’Aléaume retrouva son chapitre, mais elle avait vécu ses meilleurs jours : ses revenus diminuèrent peu à peu, les libéralités devinrent insuffisantes ou cessèrent, dans la période de déclin de la foi. À la veille de la Révolution, elle ne comptait plus que dix chanoines.

Guerre de 1870

Cinq Longiprates furent victimes des soldats prussiens opérant à proximité de l’église.
Lors de la Guerre franco-prussienne de 1870, le 28 décembre 1870, les Prussiens investirent la localité : on dénombra alors 8 tués (combattants ou civils), 15 blessés et une soixantaine de prisonniers du côté français.

Seconde Guerre mondiale

Le bourg fut anéanti à 90 % pendant la Seconde Guerre mondiale, la flèche de l’église fut détruite.

Lieux et monuments

Monument aux morts

$**Patrimoine religieux

Le portail de l’église est très dégradé.
Église : L’édifice a perdu son clocher et les sculptures de son portail sont très dégradées. Le tympan est une illustration des scènes de la mort et de l’assomption de la Vierge. Sous le portail sont fixées, de part et d’autre, 2 stèles à la mémoire non d’ecclésiastiques mais d’habitants ayant vécu dans la première moitié du xixe siècle :

celle de gauche mentionne Henri Cauchy, charron, décédé en 1858, à 58 ans.
sur celle de droite sont cités, sous l’abréviation D.O.M., Philibert Réthoré, décédé en 1827 à 47 ans, et Célestine Cauchi, décédée en 1855 à 69 ans.

Description de Pierre Dubois14 vers 1937 :

église :
portail :
Si les marteaux de révolutionnaires de 1793 ne les avaient si ardemment « bûchés », le trumeau et le tympan de ce portail seraient des documents précieux de la sculpture au début du xiiie siècle, peu d’années avant que soit entreprise la façade de la cathédrale d’Amiens. Adossée au trumeau, colonne qui sépare les 2 portes, la Vierge, qui jadis portait l’Enfant, est la sœur à peine aînée de la Vierge Dorée au portail de droite d’Amiens. À Longpré, la tête est moderne et mauvaise. Trois reliefs couvrent le tympan. Il évoquent, en bas à gauche, la mort de la Vierge dont les Apôtres sont les témoins ; à droite, sa résurrection : des anges s’inclinent et l’assistent ; en haut, le couronnement de Marie par son Fils : c’est la partie la moins détériorée […]
deux angelots :
2 petits témoins, à peu près épargnés par les vandales de 1793, prouvent la valeur technique acquise par les sculpteurs dès le temps où l’art gothique apparaissait en Picardie. Ce sont 2 charmants angelots agenouillés dans des écoinçons, des anges, entre les chambranles du portail et son linteau. Ils semblent prêts à prendre leur essor, à apporter de l’aide à l’ascension de la Vierge, à battre l’air de leurs ailes menues curieusement repliées sous une saillie de l’architecture de leur étroit abri. Les visages, encadrés de boucles, ne sont pas d’une beauté conventionnelle et fade comme beaucoup plus tard. […] Ces visages sont individualisés […]
reliques :
Henri Macqueron avait retrouvé, dans des minutes notariales à Abbeville, et a publié en 1892 deux inventaires des reliques de Longpré, établis en 1667. Ils mentionnent notamment "un drapeau (lange) que Notre Seigneur eut à l’entour des reins à la Nativité ; un fragment de la colonne de la Flagellation ; une épine de la couronne que portait Jésus pendant la marche au Calvaire...". Quant au fragment de la Croix ou aux Cheveux de la Vierge, il y en eut d’épars dans toute la Chrétienté. Voici de plus grandes raretés puisqu’elles étaient des "pièces à conviction" relatives à l’Ancien Testament : "des rameaux du buisson que Moïse vit s’allumer ; la pierre du Sinaï où Dieu était assis lorsqu’il donna à Moïse les Tables de la Loi...". Certaines reliques exposées à Corbie et dans bien d’autres lieux n’étaient pas moins surprenantes. Les ossements de saints, martyrs et confesseurs emplissaient à Longpré des vaisseaux de toutes matières et formes, des bras, des chefs (ou têtes), des croissants pour les côtes, au total, d’après les inventaires, 51 reliquaires qui presque tous datent seulement des xve et xvie siècles. Il en reste 7 seulement.
reliquaire de Saint Éloi :
Petite châsse d’une relique de Saint Éloi. C’est une chapelle minuscule, longue de 10 centimètres, large de 6, haute de 10, en bois revêtu d’argent. Le pied est en cuivre. Le saint est figuré sur une des petites faces en costume d’évêque, sa crosse est posée derrière lui et il tient à la main son long manteau d’orfèvre.
statuette de Saint Christophe :
Du trésor jadis abondant, subsiste toutefois au presbytère une pièce de haute qualité : une statuette-reliquaire (0,53 m de hauteur) de Saint Christophe portant le Christ enfant pour lui faire traverser un gué du Jourdain. Le bon géant mesure avec son grand bâton feuillu la profondeur de l’eau. Ce groupe de la fin du XVe est en bois recouvert de lames d’argent. Quelques parties, comme le bord du manteau, sont de vermeil. Un poinçon de l’orfèvre qui n’a pu être identifié est frappé 3 fois sur les épaules de l’enfant et de son porteur. Le logement rectangulaire de la relique est soudé sur le genou gauche du saint. Les descripteurs qui ont étudié cette orfèvrerie, soit à Longpré, soit à Paris lors de grandes expositions d’art ancien, lui donnent une origine allemande. Leur hypothèse est fondée sur le franc réalisme, presque caricatural, du visage, la minutieuse indication de l’anatomie, muscles et veines de la jambe droite seule visible, le tumulte des draperies. La popularité de Saint Christophe était grande pendant les derniers siècles du Moyen Âge. C’est qu’il suffisait d’avoir aperçu le matin sa représentation pour être garanti contre tout accident jusqu’à la nuit. Aussi mettait-on sa grande image en place très visible près d’une porte à l’intérieur, comme à Saint-Riquier, à l’extérieur comme à la Cathédrale.

Patrimoine civil

Monument de 1870 :
Érigé dans l’actuel cimetière, ce monument à l’honneur des combattants du 28 décembre 1870 rappelle que les combats sur le territoire de la commune firent 8 tués, 15 blessés et plus de soixante prisonniers pris dans l’ancien cimetière où la résistance s’était concentrée.

Inscriptions sur la face avant : À la mémoire des Français morts pour la défense de la patrie, 28 Xbre 1870, souscription des jeunes de Longpré.
Sur la face gauche : Gardes Mobiles du Pas-de-Calais, 4e Bon, Houssart Caporal, Carpentier Charles, Dedouiges Louis, Dubois Henry, Dufour Zéphir.
Sur la face droite : Gardes Nationaux Mobilisés du Nord, Delval Baptiste, Piquet, Saintolie’’.
Il ne s’agit donc pas de gens de la commune morts au combat.
Monument aux morts 1914-1918 :

Un coq se dresse au sommet du monument.
Se dressant à l’angle Nord-Est de l’église, il est encadré, à droite et à gauche, d’un mortier. Sa face avant est décorée par la statue grandeur nature d’un soldat moustachu, tenant son fusil par le canon, la crosse posée sur le sol, entre ses pieds. Le journal « La Somme » du 13 mars 1920 écrivit : « Il existe à Longpré un monument commémoratif, qui donne lieu, chaque année, à une manifestation patriotique. Aussi n’est-il pas question d’élever un second monument. Toutefois, pour honorer les héros de la grande Guerre, le Conseil municipal a décidé d’affecter une somme de 5 000 F, pour l’agrandissement et l’embellissement du monument actuel. Des plaques sur lesquelles seront inscrits les noms de nos glorieux morts y seront ajoutées et une souscription à domicile complétera la somme nécessaire. » La commune remit donc en état le monument dit des « Mobiles de 1870 » " pour y ajouter un hommage aux 42 morts de la guerre de 1914-1918. Arthur de Saint-Germain, entrepreneur à Hangest-sur-Somme, s’engagea à réparer et déplacer cet édicule tout en lui ajoutant un coq gaulois et des plaques de marbre portant le nom des défunts. En décembre 1920, ces travaux de remise en état étaient en cours d’exécution, mais, en 1921, un projet plus ambitieux semble avoir été choisi, celui des architectes amiénois Mallet et Carpentier.

Cimetière anglais 1914-1918 :
En avril 1918, au tournant de l’offensive allemande vers Amiens, les 12e et 55e de dégagement d’accident ont combattu près de Longpré. Ils ont ouvert un cimetière appelé cimetière britannique no 1. Fermé à la fin d’avril 1918, il contenait 35 tombes. Le cimetière actuel qui portait le nom de cimetière britannique no 2 fut fermé en mai 1918. Les deux cimetières ayant été rassemblés en 1919, les 35 tombes du cimetière no 1 forment les rangées C et D. Aujourd’hui, le cimetière anglais possède 4 rangées, pour un total de 79 tombes, 58 Anglais, 20 Australiens et 1 Français y reposent. Chaque année, une cérémonie a lieu, suivie par la dépose d’une gerbe de fleurs.

Monument du souvenir des 5 et 6 juin 1940 :
Les événements du 28 mai au 6 juin 1940 ayant été tragiques (la localité fut détruite à 90 %), le lourd tribu à la bataille de France payé ici, et les vaillants combattants de la 1re compagnie du 1er bataillon du 53e RICMS qui ont défendu la ville face aux panzer du général Rommel lors de leurs percées des 5 et 6 juin 1940, sont mentionnés ainsi :

Épitaphe du souvenir
5 et 6 juin 1940

Ils sont morts pour que les hommes s’aiment.