Épinal

  • 4 novembre 2014

Localisation

Histoire

Xe siècle : la fondation

Sur une terre qui appartenait à l’ancienne cité des Leuques, se trouve un promontoire qui surplombe les routes d’eau, nord sud de l’ancienne route de Germanie (voie romaine Metz-Bâle) et un embranchement de la voie Langres-Strasbourg. Thierry Ier évêque de Metz décide de construire sur une des manses de la paroisse de Dogneville un château et un monastère. La manse s’appelait la manse de Spinal, mais la ville recouvrait aussi les terres des manses d’Avrinsart , Grennevo, Rualménil et Villers. Il dota l’ensemble d’un marché. Le but de Thierry était de protéger le sud de ses possessions qui était attaqué par les pillards bourguignons. À l’époque, la ville de Remiremont était bourguignonne. Il donna au monastère les reliques de saint Goëry qui se trouvaient dans le monastère messin de Saint-Symphorien. Ces reliques furent l’objet de nombreux pèlerinages ce qui permit l’essor économique de la ville.

Des fouilles archéologiques ont confirmé des traces d’une présence humaine au Xe siècle. Un dépotoir a été retrouvé, ainsi que des traces de clôtures et des latrines.

Le monastère ne fut réellement occupé que sous le règne de son successeur Adalbéron II. L’église et le monastère furent consacrés en l’honneur de saint Maurice et de saint Goëry. Le monastère fut d’abord occupé par les hommes (chanoine) puis rapidement par des femmes bénédictines puis chanoinesses au XIIe siècle. L’occupation initiale par les hommes n’étant d’ailleurs pas totalement avérée.

XVIIe siècle la guerre de Trente Ans

En 1444, la ville d’Épinal faisait encore partie du domaine des évêques de Metz. En septembre, des représentants de la ville, profitent du passage du roi Charles VII à Nancy pour lui offrir la soumission de la ville et lui demander en retour sa protection. L’acte de soumission d’Épinal est daté du 7 septembre 1444. En 1445 Épinal est cédée au duc de Bourgogne pour détourner celui-ci de la Lorraine. Finalement, Épinal sera sous la tutelle du duc de Lorraine.

Le duché de Lorraine

Depuis 1466 Épinal appartient au duché de Lorraine. Celui-ci est indépendant depuis le traité de Nuremberg de 1542. À l’intérieur du duché, la ville bénéficie d’un statut de relative autonomie. Elle est administrée par un collège de quatre notables choisis tous les ans. À l’aube du XVIIe siècle, les historiens estiment que la population est d’environ 4 000 habitants. Il y a une activité importante textile parfaitement visible sur le plan peint par Nicolas Bellot en 1626 (tableau original visible dans le musée de la cité des images à côté de l’imagerie, reproduction visible au musée du chapitre). Sur cette peinture on distingue parfaitement le blanchiment sur prés des draps au lieu-dit les Gravots. Il existe également une industrie papetière utilisant les moulins sur le bord de la Moselle (également visible sur le plan Bellot). Le plan montre également le château ainsi que les remparts qui protègent la ville. La ville connaît dans la première partie du siècle une certaine prospérité grâce aux activités industrielles et commerciales. Avec l’avènement de Charles IV duc de Lorraine (début du règne le 28 novembre 1625), la situation d’Épinal et de toute la Lorraine change. Ce dernier a un caractère belliqueux et inconstant. Malgré une intelligence certaine et de bonnes qualités militaires, il se montre incapable de mener une politique qui sauvegarde les intérêts du duché. Il choisit les Habsbourg contre les Bourbons, ne comprenant pas que la France est en pleine évolution et devient la puissance dominante en Europe. Au même moment Richelieu récent conseiller du roi Louis XIII cherche à affaiblir la maison d’Autriche. La situation s’aggrave quand Charles IV accueille le frère du roi, Gaston d’Orléans alors en disgrâce qui fuyait Paris. Ce dernier épouse Marguerite de Lorraine à Nancy.

La première occupation française

En 1629, la ville est atteinte par une épidémie extrêmement violente de peste pendant les mois de juillet, août et septembre. La Lorraine est atteinte par les armées suédoises qui mènent des incursions meurtrières dans le duché en 1632.

Le 26 mars 1632, Charles IV reconnait par lettre patente les 32 religieuses de l’Annonciade sous la direction de la mère supérieure Seguin (ce couvent se situait sur la place du marché couvert).

En 1633, la ville est attaquée par les troupes françaises du maréchal Caumont de la Force. La ville se rend sans combattre ce qui lui permet de négocier des conditions favorables (proclamation du 17 septembre 1633).

En 1635, le maréchal de la Force empêche Jean de Woerth et la ligue catholique d’occuper Épinal. La ville est assiégée par Charles IV, installé à Rambervillers. La défense de la ville est sous les ordres du colonel Gassion. Charles IV doit se replier en novembre sur Besançon sans prendre la ville.

La ville est atteinte par une seconde épidémie de peste en 1636. La mortalité est énorme, à la fin de l’épidémie, il ne reste que 1000 habitants dans la ville. La ville garde la mémoire de cet épisode, l’épidémie s’est appelée l’épidémie des quarante semaines (à cause de sa durée). Un quartier de la ville s’appelle toujours le quartier de la quarante semaine (proche de l’endroit où furent enterrés les pestiférés morts de la peste).

La deuxième occupation française

En octobre de cette même année, Charles IV reprend la ville grâce à la complicité d’un conseiller de la ville Denis Bricquel. À la suite de négociations de l’abbesse de Remiremont Catherine, tante de Charles IV, la neutralité de la ville est reconnue par le roi le 24 septembre. Le 2 avril 1641, Louis XIII et Charles IV signent la paix de Saint-Germain qui ne durera que quatre mois. Le 25 septembre, le lieutenant français du Hallier prend le château de la ville au baron d’Urbache. Commence alors une occupation de la ville par les troupes françaises qui dure jusqu’en 1650. Les habitants doivent supporter les frais de cette occupation (logement et nourriture des soldats et des chevaux).

Le 16 août 1650, la France est affaiblie par la Fronde, les troupes de Charles IV commandées par le colonel Lhuiller reprennent la ville avec l’aide des habitants. Malheureusement l’occupation lorraine est aussi lourde que l’occupation française. À la suite de négociations, la ville est de nouveau reconnue neutre par les deux parties. Mais les Français s’arrangent pour faire jouer la neutralité en leur faveur. La municipalité prête allégeance sous la menace au roi de France Louis XIV le 18 juillet 1653 à Nancy. Ainsi commence la troisième occupation française qui dure jusqu’au traité de Vincennes en 28 février 1661. La ville retourne dans le giron lorrain.

La ville est ruinée par les épreuves. Dans une requête datée de 1654 au frère de Charles IV (celui-ci est alors prisonnier en Espagne), le duc Nicolas François, le rédacteur mentionne la ville comme étant celle qui est la plus misérable de la province.

Épinal cesse d’être une place forte

En 1670, les Français prennent la ville de Nancy, Charles IV se réfugie à Épinal. La ville défendue par le Lorrain Comte de Tornielle est attaquée par les troupes du maréchal de Créqui. Il s’empare de la ville le 19 septembre et le château le 28 septembre. La ville est condamnée à verser une somme exorbitante aux Français de trente mille francs barrois et doit démolir à ses frais le château et les fortifications. Ces conditions exigées sur ordre du roi étaient destinées à effrayer la Lorraine. Le château est détruit mais les fortifications ne sont détruites que partiellement. Les remparts sont en fait intégrés progressivement à l’habitat. Les portes (porte des grands moulins, porte Saint Goëry, porte d’Ambrail, porte d’Arches) sont détruites entre 1723 et 1778. La porte du Boudiou n’est détruite qu’au XIXe siècle (un jour avant l’arrivée de Prosper Mérimée qui venait déclarer la porte monument historique). Le montant de la somme d’argent à verser est fortement diminué après la reddition des autres places fortes lorraines. Mais la chute de la ville représente un tournant, la ville cesse d’être une place forte.
La ville se francise progressivement. En 1685, le bailliage est remplacé par le bailliage royal. Le système des quatre gouverneurs disparaît. Le premier maire royal de la ville, François de Bournaq est nommé.

XVIIIe siècle, Épinal devient chef-lieu du département des Vosges

En 1790, l’Assemblée constituante demande à l’assemblée départementale des Vosges de choisir entre Mirecourt et Épinal pour désigner le chef-lieu du département. L’assemblée départementale se réunit à Épinal le 1er juin et choisit par trois cent onze voix contre cent vingt-sept la ville d’Épinal. Mirecourt devient une sous-préfecture.

1870 : la guerre mais aussi le début d’un nouvel apogée

Même si Épinal est moins concernée par le conflit que les régions françaises plus au Nord, la ville est néanmoins envahie par les troupes allemandes à partir du 12 octobre 1870. Les combats pour défendre la ville ont eu lieu dans les environs à Deyvillers, vers le Château de Failloux, au bois de la Voivre et dans la tranchée de Docelles. À l’entrée des soldats par le faubourg Saint-Michel, s’illustre le spinalien Sébastien Dubois qui se plaçant un genou à terre avec son fusil au milieu de la rue abat deux soldats avant d’être lui-même tué. En représailles de la résistance de la ville, les Allemands demandent 500 000 francs or. Cette somme est ramenée à 100 000 francs après négociation. La ville est occupée jusqu’au 30 juillet 1873.

Paradoxalement, la catastrophe pour la France de la défaite de 1870 est à l’origine d’un formidable développement de la ville. Avec le traité de Francfort, la ville d’Épinal comme la presque totalité du département des Vosges reste française. Commence alors un très fort développement basé sur l’immigration de nombreux industriels alsaciens notamment du secteur textile qui fuient l’occupation allemande. Ces industriels sont à l’origine de l’industrie textile dans les Vosges. Épinal prenant la place de Mulhouse passé en territoire allemand comme centre industriel du textile. Le développement est également provoqué par la position frontalière de la ville qui devient une des quatre places fortes avec Verdun, Toul et Belfort du système de défense Séré de Rivières.

XXe siècle

Au début du xxe siècle, seul le chef-lieu d’Épinal disposera d’un réseau urbain de tramways, et il peut paraître curieux que des promoteurs aient en 1903 tenté l’aventure consistant à desservir une ville d’une population permanente avoisinant 30 000 habitants. La société se constitue le 8 juillet 1903, mais la concession est accordée à ses fondateurs, par convention du 29 août 1904 passée avec la ville pour une durée de 65 ans. Le réseau prévu comprend deux lignes à voie métrique :

Gare - Poissompré ;
Pont de Golbey - Champ du Pin
complétées par deux raccordements entre la Gare et la rue de la Faïencerie puis entre la Place des Vosges et la Préfecture. La ville consent certains sacrifices dérogeant aux conditions habituelles des concessions de tramways urbains : octroi d’une garantie d’intérêt, prise en charge de l’entretien du pavage. Le décret du 15 novembre 1904 prononce la déclaration d’utilité publique. Les travaux, entrepris en 1905, permettent la mise en service des deux lignes le 17 février 1906. Le dépôt se trouve à la Maison Romaine sur la ligne du Pont de Golbey. Il abrite douze petites motrices équipées du frein à patins et deux remorques très peu utilisées.

Le tracé des lignes, correct dans les faubourgs, devient franchement difficile en ville : voirie étroite et accidentée, itinéraires très sinueux, voie unique avec des garages très espacés. La ville d’Épinal est en outre sillonnée par des voies militaires à l’écartement de 0,60 m ; les convois de l’Armée disposent de la priorité, et il est interdit à un tramway de s’engager sur le pont de la Loge Blanche si un train militaire le franchit.

Les tramways circulent à la fréquence de 20 min, déjà dissuasive lorsque les distances à parcourir sont courtes. L’iconographie ne nous montre, en général, que des tramways peu achalandés. Les militaires, nombreux à Épinal, hésitent à consacrer deux journées de prêt pour s’offrir un ticket à 0,10 F. En conséquence, à partir de 1908 la compagnie décide d’apposer des pancartes publicitaires sur le toit de ses petites motrices pour combler les pertes financières. Toutefois, les résultats de l’exploitation sont très décevants et, lorsqu’un exercice enregistre un excédent, il s’agit d’une somme infime bien incapable d’amortir une dépense d’établissement voisine d’un million.

Peu avant 1914, la compagnie tente d’améliorer le service en utilisant un des raccordements pour obtenir une déserte plus cohérente. Il est prévu trois lignes totalisant un peu plus de 7 km :

Pont de Golbey - Préfecture ;
Gare - Champ du Pin ;
Place des Vosges - Poissompré
Le service est suspendu à la mobilisation d’août 1914.

Au sortir de la guerre, l’état d’abandon dans lequel se trouve le réseau pendant plus de 4 ans exigerait de grosses dépenses de remise en état. Ces frais paraissent injustifiés au regard des résultats antérieurs. La société prononce sa dissolution et sa mise en liquidation en 1920. Les liquidateurs acceptent le 5 février 1925 de signer une convention de résiliation de la concession, et prennent à leur charge la dépose des installations. Le décret du 13 août 1925 prononce le déclassement du réseau.

Occupation puis libération de la ville

En juin 1940, pour protéger la retraite des troupes françaises en débâcle, le génie fait sauter les arches centrales du magnifique viaduc de la Taverne à Dinozé. Le 11 juin 1940, les Allemands vont à leur tour bombarder le viaduc de Bertraménil au cours de leur offensive de manière à couper tout lien ferroviaire aux troupes françaises dans ce secteur.

Le fort de Longchamp situé au nord d’Épinal, qui est le fort le plus puissant de la place, combattit quatre jours en juin 1940 avec un effectif très réduit. Il tirera près de 300 obus de 155 et 400 de 75. Les bombardements qu’il subira ne feront aucun dégât majeur mais cinq soldats périront dans le fort pendant les combats (3 Allemands et 2 Français). Il sera complètement ferraillé en 1943-44.

La libération d’Épinal commença les 22 et 23 septembre 1944 par un duel d’artillerie qui fut particulièrement tragique pour la ville dont le centre a été durement éprouvé.

Auparavant, débarquée en Normandie, la 3e Armée américaine commandée par le Général Patton a libéré le nord de la région d’Épinal. La 2e DB commandée par le Général Leclerc formait alors l’aile droite de la 3e Armée américaine. Elle libérait Dompaire et avança sur Épinal par le nord et l’ouest (Chaumousey, Les Forges, Chantraine).

Débarquée en Provence, la 1ère Armée française, commandée par le Général de Lattre de Tassigny, montait en parallèle avec la 7e Armée américaine et libérait la région sud d’Épinal après avoir pris Toulon, Marseille, Lyon…

Ainsi, les forces alliées avaient décidé de prendre la ville d’Épinal en tenaille, en particulier grâce aux renseignements communiqués par les réseaux de résistance locale.

Très vite, l’ennemi fut chassé de l’usine où il était replié dans l’actuel quartier du port, et les Alliés prirent le dessus sur des Allemands manquant de munitions.

Le dimanche 24 septembre 1944, vers 17h30, le premier char américain de la 7e Armée américaine, commandée par le Général Patch entra par le sud dans la ville d’Épinal sous les acclamations de la population : la victoire s’annonçait enfin.

Les habitants vivaient alors la fin de l’époque la plus dure et la plus cruelle de l’histoire de la ville.

Épinal était libérée, mais la ville était terrassée. Son centre était détruit, le quartier de la gare était totalement rasé après les séries de bombardements visant à chasser l’ennemi. L’hôpital, le lycée, la prison…, toutes les installations, la plupart des ponts, des écoles et l’église, un nombre considérable de logements étaient entièrement ou partiellement détruits.

Au cours de la lutte, l’explosion des ponts fut si forte que tous les immeubles et les magasins bordant les rives de la Moselle eurent à souffrir.

La ville comptait ses morts au milieu des gravats.

Durant l’hiver 1947-1948, une forte crue de la Moselle accrut encore les dégâts.

Le Cimetière américain d’Épinal d’une superficie d’environ 22 hectares, fut construit sur le site libéré le 21 septembre 1944 par la 45e Division d’Infanterie américaine. Le Mémorial est composé d’une chapelle et d’un musée ainsi que d’une Cour d’Honneur.

Administration

Pays Drapeau de la France France
Région Lorraine
Département Vosges (préfecture)

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